En fin de semaine, un grand dossier sur l’indépendance financière a été publié dans le Journal de Montréal (JDM). Jusque là, tout va bien, plusieurs témoignages ont été publiés, notamment ceux du Jeune retraité et de Retraite 101. Là où ça s’est gâté, c’est quand 3 chroniqueurs se sont joints à la discussion dès le lendemain, en ajoutant leur opinion sur le mouvement FIRE.
Cher chroniqueur, tu as choisi la voie facile. Celle qui génère beaucoup de clics. Tu voulais faire réagir, et c’est réussi, parce que je me permet d’écrire ce billet aujourd’hui. Tu ne le liras probablement pas, mais quand même, ça me fait un grand bien de l’écrire.
Quand je parle de la voie facile, c’est que tu as seulement remaché l’argumentaire classique contre le mouvement FIRE. Grosso modo, en 2 phrases : « Voyons, à 20 ou 30 ans, il faut vivre, il faut profiter de la vie et non compter ses sous pour la retraite. Accumuler 1 million, c’est IM-PO-SSI-BLE, profite du moment présent et ne te prive pas. »
Le titre du texte est très éloquent d’ailleurs : La retraite à 40 ans? Ark!
Le problème de ce premier billet, c’est que le chroniqueur passe complètement à côté de la plaque. On voit bien qu’il a lu en diagonale les textes des blogueurs et membres FIRE invités. Toutes et tous répètent dans leur entrevue qu’ils ne se privent pas et qu’ils profitent bel et bien de la vie.
Privation ou frugalité?
Évidemment, Richard/Francis/Michel, tu as l’impression qu’on se prive. Il y a une grosse différence entre la frugalité et la privation. Par exemple : Si j’ai décidé de ne pas avoir de char, je le fais pour mes finances certes, mais c’est aussi pour l’écologie, ou la communauté. Passer 1-2 heures par jour seul dans une grosse boite en métal à rager contre le trafic, non merci.
Je préfère nettement me promener à vélo, discuter brièvement aux arrêts avec mes comparses et faire mon sport quotidien. En plus, j’arrive au bureau rafraîchi et détendu. En hiver, c’est effectivement plus lent lorsque je prends l’autobus. Ce n’est pas plus grave que ça, ça me laisse du temps pour rattraper ma lecture ou faire une petite sieste. Ralentir, ça fait tellement du bien.
Côté bouffe, je mange bio et local, je réside dans une maison de ville moderne (et bientôt payée), j’achète des bières artisanales et je profite de ma ville. Les spectacles l’été, les chalets loués et les expériences épicuriennes l’hiver. Bon, ça ne sert à rien de tout lister ici, je pense que tu comprends l’idée.
Voyage, voyage
Ensuite, on a voyagé dans notre vingtaine, et probablement plus que les partisans du mouvement auto-boulot-costco. Que ça soit dans les Amériques, en Europe, en Afrique du Nord et même en Asie. Évidemment, j’ai voyagé en sac à dos en masse. Mais je le répète, je ne me suis pas privé une seconde : J’ai mangé dans les plus grands restaurants, et j’ai dormi dans les meilleures auberges de jeunesse.
À destination, je me suis déplacé en vélo, en autobus, en auto-partage, en train ou même en bateau. Pour ne donner qu’un exemple, au lieu de payer un fort prix pour un tout inclus, on a souvent préféré séjourner dans une petite auberge et marcher jusqu’à la plage.
Et le boulot?
Tu as aussi l’impression que je n’aime pas ma job. Et bien c’est faux. Je fais partie des partisans du mouvement FIRE qui aiment leur emploi (et je ne suis pas le seul). Oui oui, c’est possible de viser l’indépendance financière et d’apprécier son emploi! Et j’ai un horaire tout à fait régulier de 35 heures/semaine. Bref, un peu de nuance aurait été apprécié.
Un autre chroniqueur en ajoute en conclusion et insinue que l’ambition FIRE « se traduit par la promotion de l’isolement et le refus de contribuer à la société, elle risque de mener davantage à des enjeux de santé mentale qu’à notre épanouissement ».
Voyons donc.
Je suis pas mal certain que je vais contribuer tout autant à la société en passant plus de temps avec mes amis et ma famille, en m’impliquant bénévolement auprès d’organismes avec des valeurs qui me sont chères (écologie, communautaire, transport actif/collectif, développement durable, etc.) qu’à mon emploi actuel. Et le fait de ne plus passer 35 heures/semaine devant un écran, est-ce que ça pourrait vraiment développer des enjeux de santé mentale? Poser la question, c’est y répondre.
Après, je comprends, il fallait réagir vivement à la suite du dossier sur l’indépendance financière, pour présenter un contre-argumentaire, qui manque ma foi d’audace et qui résiste au changement. Une position consumériste qui invite à stagner et à chialer. Qui donne le goût de scander : Vive le 9 à 5, vive le American way of life, vive les 2 semaines de vacances par année, vive la surconsommation!
La quête vers l’indépendance financière, c’est aussi une quête vers un mode de vie plus sain, lent et harmonieux. C’est une quête vers un bonheur alternatif, légèrement en marge de la trame nord-américaine véhiculée dans les publicités. Mr. Money Mustache l’a expliqué à maintes reprises, notamment dans son plus récent article.
Bref, je suis normalement plus positif dans mes articles, mais cette fois-ci, il fallait quand même prendre quelques minutes pour remettre un peu les pendules à l’heure. Ce que je viens d’écrire est probablement un peu tout croche, je le conçois. Quand même, ça fait du bien de se défouler un peu et d’étaler sa pensée. Ne vous inquiétez pas, mon ton jovial va revenir très bientôt. 🙂
À bientôt les visionnaires,
Le Renard
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